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La ruelle des lutins

Alexandre Dumas

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La ruelle des lutinsNous rentrâmes à Aix-la-Chapelle par la porte de Cologne, et comme je le lui avais recommandé, mon cocher m’arrêta devant la ruelle des Lutins. c’est encore une vieille tradition qui a donné à cette petite rue le nom de Hinzen Geeschen.C’est qu’il y avait autrefois dans le pays du Limbourg, à l’endroit même où s’élèvent aujourd’hui les ruines de ce château d’Emmaburch, que, grâce à la tyrannie de Frédéric-Guillaume, je n’avais pu voir qu’en me démanchant le cou, d’immenses souterrains dont personne n’avait jamais trouvé l’extrémité: ces souterrains, déserts en apparence le jour, devenaient la nuit la demeure de ces bons lutins de la famille des Trilby, dont Nodier nous a écrit l’histoire. là, ces gracieux enfants de la Terre, aux malices innocentes et aux folles joies, se réunissaient dès que le soleil était couché, et restaient jusqu’à une heure du matin rangés autour de longues tables, chantant des chansons dans une langue inconnue, et trinquant dans de petites coupes d’or, dont le choc imitait si bien le tintement d’une clochette qu’un jour un berger, qui avait perdu sa génisse, croyant qu’elle s’était enfoncée dans les souterrains, y descendit guidé par le son, et vit tout ce monde joyeux et souterrain buvant ses vins exquis et chantant ses folles chansons. Alors il comprit que ce bruit, qu’il avait pris pour celui de la clochette de sa génisse, était celui des petites timbales d’or, et il se retira aussitôt, sans que les lutins, qui cependant l’avaient vu, lui eussent fait le moindre mal.Mais le berger ne leur garda point le secret qu’ils espéraient de lui, et sa première démarche, en sortant du souterrain, fut pour aller dénoncer à son confesseur les petits démons qui faisaient si bonne chère: le confesseur était un moine sévère qui n’aimait point les fêtes clandestines, et qui voulait qu’on ne s’amusât que les jours autorisés par le calendrier. Il fit une quête, rassembla une somme considérable, bâtit une église à l’endroit même où le berger était entré dans le souterrain, plaça une croix sur sa coupole, et vint en toute pompe et suivi du clergé dans la chapelle y dire une messe, et y procéder aux exorcismes indiqués par le rituel.Mais il n’y avait pas besoin de tant de cérémonies: au premier coup de cloche, les pauvres petits diables de lutins avaient été forcés de déguerpir.Cependant les exilés, privés de leur antique logement, avaient choisi un autre domicile. et tandis qu’en punition de son indiscrétion le berger s’en allait mourant d’une maladie de langueur, ils s’étaient installés dans les souterrains d’une tour située entre les portes de Cologne et de Sand-Kaul. Mais hélas! les pauvres petits diables n’avaient point eu le temps, en quittant leur domicile, d’en emporter le mobilier qui le garnissait. de sorte qu’ils n’avaient plus ni plats d’argent ni timbales d’o

Nombre de pages : 4

Date de publication :

Éditeur : Audiocité

Le studio Littérature

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